Contes de la Galaure

Le sillage des fées

Juste avant de se jeter dans le Rhône, la Galaure dessine deux méandres sinueux autour de la colline de Vals.

Elle ne se divise pas — elle enlace.

Deux courbes lentes et profondes, comme si l’eau traçait une danse ancienne, un rituel oublié. Les anciens disaient que ces détours étaient les bras d’une fée endormie, couchée sur le flanc de la colline. On l’appelait Valséa, fille des sources et gardienne des mémoires.

Entre ces deux boucles, l’eau ralentit, et son murmure change. Ce n’est plus le chant des galets, mais quelque chose de plus doux, plus étrange. Une litanie qui semble vous connaître. On raconte que ceux qui écoutent longuement entendent des voix — des voix de femmes, fines comme du cristal, qui rient ou pleurent selon l’heure du jour.

Les enfants nés dans la vallée apprenaient autrefois à ne jamais jeter de pierre dans ce méandre. Non par superstition, mais par respect. Car chaque remous était peut-être une robe, chaque reflet un regard.

Puis, après ce double enroulement, la Galaure file droit vers le Rhône. Mais elle part doucement, comme si elle hésitait encore… laissant derrière elle la trace d’un passage, ou peut-être d’un enchantement.

Parfois, à la tombée du jour, si le silence est profond et l’esprit paisible, on dit que l’on peut les entendre : un éclat de rire cristallin, un souffle léger au creux de l’oreille, comme si les fées chuchotaient encore à celles et ceux qui savent écouter.

© Dali Berthois, 2024


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